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ACTUS
Le droit des successions va être modernisé
Le
4/5/2005
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Annoncée il y a plus d'un an par le premier ministre en personne, une deuxième réforme des successions a été présentée dans ses grandes lignes par le Garde des sceaux, Dominique Perben, au 101ème congrès des notaires le 2 mai 2005, basée sur les résultats d'une enquête réalisée par questionnaire adressé à l’ensemble des notaires de France. Le projet de loi correspondant doit être présenté au conseil des ministres du 25 mai prochain. Datant pour l'essentiel de la rédaction du Code civil en 1804, le droit des successions avait déjà été retouché en 2001 avec une amélioration des droits du conjoint survivant (1). Cette fois le projet est plus ambitieux et vise à moderniser en profondeur le règlement des successions, et réduire ainsi les conflits et blocages qui le font souvent s'éterniser, au grand préjudice des héritiers comme des éventuels créanciers du défunt ou de la succession.
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Le projet de réforme repose sur trois grands axes : accélération et sécurisation du règlement des successions pour les héritiers, renforcement de la liberté testamentaire en autorisant les pactes de renonciation à la "réserve" et en facilitant le recours aux donations-partages, et adaptation du droit des "libéralités" en permettant notamment des donations ou des transmissions directes aux petits enfants, et en prenant mieux en compte les besoins spécifiques en matière de transmission des entreprises.
Fixation de délais et assouplissement des conditions d'acceptation des héritages
L'objectif est de fluidifier le règlement des successions en créant une contrainte de délai aux héritiers pour accepter la succession - quatre mois après le décès - assortie d'une contrepartie : la possibilité de revenir sur leur acceptation par l’intermédiaire de la procédure dite "d’acceptation à concurrence de la valeur de l’actif" nouvelle version de l'acceptation "sous bénéfice d’inventaire". Les mécanismes de cette option seront simplifiés afin de permettre aux héritiers d’y recourir plus facilement, et les héritiers qui y auront recours ne seront pas tenus du passif sur leurs biens personnels. En contrepartie, les créanciers de la succession pourront être préférés sur les biens de la succession.
S’agissant de l’acceptation pure et simple, le projet prévoit que les héritiers pourront demander à être déchargés d’une dette qu’ils avaient de "justes raisons" d’ignorer, si son paiement a comme conséquence d’obérer gravement leurs patrimoines...
Un délai d'un an serait également imparti aux notaires pour régler les successions, sauf prorogation "si la complexité de la situation l'exige"...
Assouplissement des règles de fonctionnement des indivisions post-successorales
Actuellement, les actes d’administration et de disposition de l’indivision successorale nécessitent l’accord de tous les indivisaires et peuvent être bloqués par un opposant. Dans le projet de loi, l’unanimité ne sera plus requise mais seulement la majorité des deux tiers. Notons que les articles 1873-1 et suivants du Code civil permettaient déjà cette possibilité mais il faut pour cela conclure une convention et la soumettre aux formalités de la publicité foncière ; de surcroît, la règle de l'unanimité s'impose malgré cela pour toute vente d'immeuble...
Mieux préserver les droits des créanciers du défunt
Pour ces derniers, une succession qui traîne voir même qui tombe en déshérence peut entraîner un préjudice majeur ! Dans le domaine de l'immobilier, deux types de créanciers peuvent être particulièrement concernés :
- les bailleurs, pour des arriérés locatifs antérieurs au décès d'un locataire, et pour le paiement des loyers et des charges par la succession après celui-ci : si pour les baux d'habitation courants, relevant de la loi du 6 juillet 1989, le contrat de location est "résilié de plein droit par le décès du locataire" dès lors qu'il ne peut être transféré au conjoint survivant ou au partenaire de PACS, ou aux descendants ou ascendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès (article 14), pour les autres baux comme les baux professionnels, commerciaux ou meublés, et même les baux régis par la loi de 1948 lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un "congé de pure forme", le droit au bail fait partie de la succession ; en cas d'inertie des héritiers ou de vacance pure et simple, le bailleur en est réduit à passer par les étapes de la procédure de la résiliation du bail pour non paiement, puis celles de l'expulsion...
- le syndicat des copropriétaires pour les biens possédés par le défunt dans des immeubles en copropriété : celui-ci est encore plus démuni que le bailleur car les charges continuent à courir jusqu'au transfert effectif de propriété des biens à un ou plusieurs héritiers, ou à défaut jusqu'à nomination à la diligence du syndic de l'administration des Domaines en qualité d'administrateur ou de curateur de la succession (suivant qu'il y a des héritiers identifiés mais inactifs ou que la succession est vacante par absence d'héritiers ou renonciation par les héritiers connus à leur héritage) ; en cas de blocage, les procédures longues et complexes, que les syndics et leurs avocats ne connaissent pas toujours bien, peuvent prendre des années à aboutir, pendant lesquelles la créance ne cesse de croître, au risque même de dépasser la valeur vénale des biens !
En autorisant les héritiers à accomplir des actes de gestion sur le patrimoine du défunt avant l’acceptation de la succession, le projet facilite le règlement des dettes courantes. Les héritiers pourront se mettre d’accord pour désigner l’un d’entre eux ou un tiers pour administrer la succession. En cas de mésentente des héritiers, de carence ou de faute de l’un d’entre eux dans l’administration de la succession, un mandataire successoral pourra être désigné par le tribunal de grande instance afin d’administrer la succession. Le projet consacre également les mandats posthumes, qui pourront être donné par le défunt à un tiers aux fins de gérer les biens successoraux lorsque ceux-ci nécessitent une certaine aptitude que n’ont pas les héritiers (ex : transmission d’une entreprise en présence d’héritiers mineurs, enfants handicapés, etc.)...
Nul doute que la fluidification du traitement des successions et l'imposition de délais courts pour leur règlement limitera l'ampleur des préjudices de ces deux types de créanciers, comme au demeurant de tous les autres...
(1) loi no 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral - voir aussi notre article "Droits du conjoint survivant : ce qui change pour le logement"
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